Emprunter pour investir – est-ce un pari rentable ?
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Lire le résumé d’une excellente étude de la conseillère et actuaire Mélanie Beauvais qui démontre qu’il est essentiel que les intérêts soient déductibles et que « l’enrichissement de l’effet de levier à long terme peut être très marginal par rapport au risque additionnel encouru » dans Finance et Investissement.
Quand la stratégie à effet de levier est perdante
La probabilité que ce soit le cas est significative, même sur 5 ans.
Emprunter pour investir est une stratégie qui peut être avantageuse pour certains clients ayant notamment des actifs non enregistrés et un profil d’investisseur dynamique. Or, la volatilité des rendements boursiers et le taux d’intérêt de l’emprunt font que des pertes peuvent survenir même sur des périodes non négligeables.
Résultat : « l’enrichissement de l’effet de levier à long terme peut être très marginal par rapport au risque additionnel encouru » par le client. Voici l’un des constats présentés par la planificatrice financière et actuaire Mélanie Beauvais, conseillère, Centre d’expertise, Banque Nationale Gestion privée 1859, lors du dernier congrès de l’Institut québécois de planification financière (IQPF), à la fin de septembre.
Mélanie Beauvais a analysé les conditions où il peut être sensé d’investir en utilisant l’effet de levier pour effectuer des placements.
« Cette stratégie est seulement pertinente si les intérêts sont déductibles », indique par ailleurs Mélanie Beauvais, qui est également actuaire, dans ce document.
Or, tant Québec qu’Ottawa ont des règles différentes à considérer. « Au fédéral, les intérêts sont déductibles dans la mesure où l’on peut démontrer un espoir de profit et qu’ils sont à l’encontre de tous les revenus. Au Québec, les intérêts déductibles sont limités au revenu de placement « passif » imposable (donc seulement 50 % du gain en capital réalisé) », lit-on dans le document de l’IQPF.
Lorsque des intérêts sur un emprunt sont déductibles, on peut alors comparer le taux net après impôts avec le rendement net après impôts de la composante de titres à revenu fixe que le client détient dans son portefeuille. Ce faisant, on se rend compte que l’emprunt crée presque inévitablement une perte fixe.
En effet, historiquement, les taux d’emprunt excédent de 200 points de base (pb) le rendement que peuvent générer les titres à revenu fixe. « Mettre en place une stratégie d’effet de levier pour du placement en titres à revenu fixe, cela signifie qu’il y a de grandes chances que la stratégie soit perdante, et ce, avant même de tenir compte des frais de gestion », indiquait-elle dans un atelier du congrès.
Considérant que les coûts d’emprunt surpassent les rendements générés par les titres à revenu fixe et qu’ils créent donc une perte fixe, l’effet de levier peut être intéressant pour un client dont la tolérance au risque lui permet d’avoir un portefeuille à 100 % en actions.
« L’effet de levier ne devrait être envisagé qu’après avoir augmenté la composante d’un portefeuille de placements non enregistrés à 100 % en actions », écrit-elle dans le cahier du participant du congrès de l’IQPF.
Une fois ces conditions remplies, Mélanie Beauvais a calculé la probabilité que l’effet de levier crée une perte notamment en raison de la volatilité des rendements. Elle a fait des simulations de Monte-Carlo en présumant que les actions génèrent un rendement supérieur de 2 points de pourcentage au taux d’emprunt, ce qui correspond aux Normes d’hypothèses de projection de l’IQPF.
La probabilité d’avoir perdu de l’argent en faisant l’effet de levier est supérieure à 40 % après un an et « demeure à plus de 20 % après 5 ans (après ajustements pour la fiscalité). » Au bout de 10 ans, elle est autour de 10 % et après 15 ans, inférieure à 5 %.
« Même sur une période de 15 ans, on ne peut garantir que l’effet de levier sera nécessairement une stratégie gagnante. Il est donc possible que la stratégie de l’effet de levier risque d’appauvrir l’investisseur », soutient-elle.
Dans un autre exercice de simulations de Monte-Carlo, l’actuaire a découvert que la probabilité que l’effet de levier génère des rendements inférieurs aux rendements de la stratégie d’effectuer des apports périodiques de capitaux est donc encore plus élevée que ceux présentés ci-haut.
« Sur 15 ans, avec 1000 simulations, j’en ai 400 où j’aurais préféré de faire de l’épargne systématique plutôt que de contracter une dette pour avoir un plus gros placement. J’ai refait d’autres simulations et on tourne autour de 30 à 40 % de probabilité que l’effet de levier soit perdant [par rapport à l’épargne systématique] », expliquait-elle lors du congrès.